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Liberté religieuse: les ravages du fondamentalisme

La fondation Aide à l’Eglise en détresse (AED) a publié son rapport annuel sur la liberté religieuse dans le monde. Il est particulièrement préoccupant, notamment en ce qui concerne l’impact de « l’hyper-extrémisme » religieux à l’échelle mondiale.

La treizième édition du rapport publié par Aide à l’Église en Détresse sur la liberté religieuse dans le monde mentionne que sur les 196 pays étudiés au cours des deux dernières années, 38 bafouent cette liberté. Pire, dans 23 pays, des hommes et des femmes sont persécutés pour leur foi; et dans 12 de ces pays, les persécutions religieuses se sont aggravées depuis 2014.
Mais le rapport met surtout en évidence le développement du fondamentalisme dont les conséquences en termes de morts, de destruction, de déplacement et d’instabilité sont sans précédent. Pour AED, cet « hyper-extrémisme islamiste » se caractérise par ses tentatives systématiques de chasser tous les groupes de convictions différentes – y compris les modérés -, une cruauté sans précédent et l’utilisation efficace de médias sociaux pour glorifier la violence. Il est réellement devenu une menace pour la paix mondiale, la stabilité et l’harmonie sociale en Occident. De fait, entre juin 2014 et juin 2016, 1 pays sur 5, de l’Australie à la Suède, en passant par la France et dix-sept pays africains, a été ainsi visé par des attaques directement liées à cet « hyper-extrémisme ».

Génocide:

Pour John Pontifex, rédacteur en chef du rapport, cette émergence d’une forme d’hyper-extrémisme religieux dans de nombreuses parties du monde est « la marque d’une intention génocidaire évidente » contre les chrétiens et plusieurs autres minorités religieuses, perpétrée au Moyen-Orient principalement par les extrémistes radicaux, en tête desquels le groupe État Islamique. L’Irak, la Syrie et la Libye sont les pays où la cruauté atteint son comble. Ce qui fait écrire au Père Jacques Mourad (moine chrétien, détenu cinq mois durant par Daech, en Syrie, avant de réussir à s’évader), et auteur de la préface de ce rapport, que « notre monde est au bord du gouffre d’une catastrophe totale, car l’extrémisme menace d’anéantir toute trace de diversité dans la société ».
La liste des pays montrés du doigt est en effet particulièrement longue. Au Pakistan, un attentat le dimanche de Pâques a fait 78 morts. Au Niger, au Nigéria, au Soudan, les victimes des extrémistes de Boko Haram ne se comptent plus. Au Bangladesh, on déplore 48 meurtres dans un intervalle de 18 mois. Les groupes religieux minoritaires sont la cible principale, avec une augmentation du taux d’attaques mortelles contre les chrétiens, les hindous et les autres minorités, avec meurtres ou menaces de mort contre le clergé et les convertis. En Indonésie, le rapport évoque la fermeture de plus de mille églises depuis 2006, et les cas de plusieurs églises brûlées.

L’islamisme extrémiste: « moteur » des déplacements massifs des populations

Contrairement à l’opinion largement répandue qu’en règle générale, ce sont les gouvernements qui sont responsables de la persécution, le rapport condamne les groupes militants non-étatiques (Boko Haram, Daech…) dans 12 des 23 pays les plus fortement concernés.
Eu égard au nombre de réfugiés, qui, selon les informations des Nations unies, a atteint un nouveau chiffre record de 65,3 millions de personnes, le rapport désigne donc l’islamisme extrémiste comme le « moteur » des déplacements massifs de personnes qui prennent la fuite de pays tels que l’Afghanistan, la Somalie et la Syrie.
Par ailleurs, le rapport de l’Aide à l’Église en Détresse met en évidence l’effet « domino » dans les pays occidentaux, dont le tissu socio-religieux est déstabilisé par l’arrivée d’un nombre sans précédent de réfugiés et de migrants. Ils sont d’autant plus déstabilisés qu’ils sont soudain confrontés à un accroissement des attaques perpétrées par des islamistes fondamentalistes.
« Notre rapport constitue un signal de réveil, tirant la sonnette d’alarme pour mettre en évidence que l’extrémisme est entré dans une phase nouvelle et nettement plus dangereuse », indique John Pontifex qui constate également que les groupes religieux doivent lutter contre la haine religieuse au sein de leurs propres rangs.
Cependant, tous les problèmes concernant la liberté de religion ne doivent pas être perçus en rapport avec l’islam militant. En Chine et au Turkménistan par exemple, une nouvelle vague de violentes répressions contre des groupes religieux a été signalée, ainsi qu’un déni permanent des droits de l’être humain pour les croyants en Corée du Nord et en Érythrée où 3.000 chrétiens sont emprisonnés à cause de leur foi.

L’Occident doit reconsidérer la religion

Autre difficulté mise en lumière par le rapport: le fait que, souvent, les décideurs politiques des pays occidentaux ne comprennent simplement pas la religion et doivent reconsidérer leur vision des choses dans son ensemble. « Une conception selon laquelle une pratique traditionnelle de la foi appartiendrait au passé n’est plus de mise alors qu’il est prouvé que pour des millions et des millions de personnes – une nouvelle génération – la religion est au centre de leur vie et représente la force motrice de tout ce qu’elles font », relève AED.
Malgré le sombre tableau dressé, il existe des raisons d’espérer: au Bhoutan, en Égypte et au Qatar, des pays connus pour violer la liberté de religion, on a constaté que la situation des minorités religieuses s’était améliorée. Or, comme le rappelle AED, il existe un lien étroit entre la liberté religieuse et la paix. Il faut protéger la première pour espérer la seconde. « Et pour cela, il faut aussi veiller à l’éducation des plus jeunes », relève Marc Fromager, directeur d’AED-France . « Une génération sans scolarité – car empêchée à cause de conflit comme en Syrie – est une génération perdue qui pourra facilement se rallier à des groupes extrémistes, faute de perspectives ».
Ne nous laissez pas sucomber
Réfléchissez depuis quand cette monté en puissance et vous aurez le clef du pourquoi (lisez Saint Nilus).